Des Repères en temps de crise

L’un des paradoxes de cette période de confinement, qui nous a séparé(e)s, est que nous avons pris des nouvelles de personnes auxquelles nous pensions, mais sans nécessairement leur faire savoir. Les lecteurs les plus fidèles des « Repères » formant comme une famille (très) élargie, nous espérons que vous allez aussi bien que possible. 

Cela a été répété, cette crise est à la fois un révélateur des inégalités, d’abord entre le « front » et l’arrière, et un accélérateur de processus antérieurs, dont le capitalisme numérique. C’est évident pour celles et ceux parmi nous qui sont des enseignant(e)s (ou des parents d’élèves). C’est aussi le cas pour l’édition. Il y a celles et ceux dont l’activité a été brutalement suspendue, qu’il s’agisse des libraires, mais aussi de la longue chaîne de fabrication, de distribution, de diffusion des livres. En amont, nous avons continué à travailler, peut-être même plus encore que d’habitude car les auteur(e)s disposaient parfois de temps pour soumettre des projets ou rendre des manuscrits jusqu’alors en retard. Il en a résulté un effet de congestion qui impose un redéploiement de la programmation.

Certes, et heureusement, les ventes de livres numériques et les consultations sur Cairn.info ont sensiblement augmenté, mais nous nous inquiétons évidemment de l’ampleur du choc sur l’édition papier. Nous espérons que nos lecteurs retrouveront rapidement leurs meilleures habitudes. Depuis la réouverture des libraires, nous avons réussi à sortir de nombreux titres : Les limites planétaires, Histoire de l’Algérie depuis 1988, Faire preuve (Howard Becker), Les théories en études de genre, une Sociologie du football, deux introductions, l’une à Claude Lefort, l’autre à Sigmund Freud, une Sociologie de Jérusalem, et enfin une nouvelle édition de Voir, comprendre, analyser les images. Se vérifient ainsi l’étendue de la gamme « Repères » et sa vocation d’encyclopédie des sciences sociales. Ces livres sont bien sûr tous excellents, mais nous attirons l’attention de toutes celles et tous ceux qui ont été et sont toujours atrocement privés de « foot » sur la parution du titre de la série Sociologie qui a été écrit pour apaiser leurs tourments. Il fallait bien sûr l’anticiper, mais nous l’avons fait.

Cette crise permet aussi de mieux comprendre ce que signifie l’incertitude radicale. Quelles seront les conditions de la rentrée ? Quels seront les effets retardés du confinement, les effets domino de la récession ? Y aura-t-il une réplique ? Dans l’immédiat, nous y voyons plutôt une bonne raison pour vous souhaiter de vraies vacances d’été. Pendant lesquelles nous espérons que vous prendrez le temps de lire.

Pascal Combemale, directeur de la collection Repères