Les sciences économiques et sociales (SES) ont cinquante ans...

... ça se fête ! Car c'est une discipline improbable qui survit de manière assez miraculeuse au sein de nos lycées.

D'une part, elle n'est pas soutenue mordicus par le monde universitaire - comme le sont par exemple la philosophie ou l'histoire - parce qu'elle est « trop ceci » (interdisciplinaire, indisciplinée, etc.) et pas « assez cela » (« scientifique », « rigoureuse », « expérimentale », dirait aujourd'hui la fine fleur de la science économique standard). D'autre part, elle désespère le monde patronal et monsieur Pébereau, qui se veut aujourd'hui le grand rénovateur de l'enseignement de l'économie au lycée.

En effet, de quoi osent parler les SES aux lycéens de 15 à 18 ans ? Du monde économique tel qu'il est et fonctionne concrètement : avec des « vrais gens » qui font tourner la machine économique, avec des conflits, avec des rapports de force qui peuvent être traduits en courbes ou tableaux, bref des statistiques incontestables si tant est qu'on explique comment elles sont produites.

Alors, la création de SES, une affaire de « gauchistes » ? De soixante-huitards avant la lettre ?

Que nenni ! À la racine de ce projet un peu insensé, au pouvoir, des gaullistes éclairés et souhaitant donner un enseignement de base en économie, des historiens de l'École normale supérieure ayant rêvé d'apprendre l'économie et la sociologie, des économistes du temps de l'enseignement de l'« économie politique ».

On peut souhaiter longue vie à cet enseignement au lycée et on peut aussi rêver que les SES soient enseignées en première et terminale aux élèves des séries S et L qui en sont absurdement privés.

 

Stéphane Beaud
professeur de science politique à l'université de Paris Ouest Nanterre, membre du comité éditorial de la collection « Repères »

 

[Lire également le texte de Pascal Combemale]